2.1 Si je réfléchis au travail accompli par mon bureau au cours des huit dernières années, je peux dire que je suis très satisfait du large éventail de programmes et de services que nous avons traité. Nous avons examiné des questions de sécurité publique telles que le transport scolaire, la salubrité des aliments et les conducteurs à risque élevé. Des vérifications reliées à l’environnement ont été effectuées sur la qualité de l’eau des puits domestiques, la gestion des terres de la Couronne, les terre à bois privées, et les inspections environnementales. Nous nous sommes penchés sur des domaines dans lesquels des services sont fournis à des segments vulnérables de la population, dont les installations de garderie et les foyers de soins. Nous avons réalisé des vérifications sur la salmoniculture, les Archives provinciales, les hôpitaux psychiatriques et la gestion des risques assurables dans les bâtiments publics. Par ailleurs, la gouvernance des organismes de la Couronne a fait l’objet de quatre vérifications distinctes. Gérance et reddition de comptes 2.2 Je constate dans notre travail que quatre aspects reviennent à maintes reprises. Ces aspects ont tous trait au rôle de gérance que joue le gouvernement dans la gestion des ressources que la population lui a confiées et dans l’assurance que les services sont fournis à la population de manière économique, efficiente et efficace. Si je les souligne ici, c’est que ces aspects comportent de graves lacunes et offrent des possibilités d’amélioration énormes. 2.3 Les quatre domaines en question sont les suivants : • Établissement d’objectifs et rapport des résultats • Respect des mesures législatives • Évaluation des programmes • Surveillance adéquate des organismes de la Couronne 2.4 Sous chaque rubrique, je traite de nos constatations et j’indique où, à mon avis, le gouvernement devrait apporter des améliorations. Puis, je conclus chaque partie en offrant à l’Assemblée législative des suggestions de mesures qui contribueront à la reddition de comptes du gouvernement. 2.5 Mon bureau rencontre le Comité des comptes publics au sujet des vérifications dans les ministères, et le Comité des corporations de la Couronne au sujet des vérifications dans les organismes de la Couronne. Les comités se servent des résultats de notre travail pour demander des comptes aux ministères, aux organismes et au gouvernement dans son ensemble. Ces comités et l’Assemblée législative ont la responsabilité d’assurer une surveillance du gouvernement au nom du public. Je conclus ce chapitre en formulant des observations qui pourraient améliorer l’efficacité des comités et de l’Assemblée législative dans leur rôle de surveillance. Établissement d’objectifs et rapport des résultats 2.6 Le gouvernement a une directive sur les rapports annuels qui est en vigueur depuis 1991. La directive regroupe un certain nombre d’éléments clés en matière de reddition de comptes et de présentation d’information sur le rendement. 2.7 L’objectif de la directive est le suivant : Le rapport annuel vise avant tout à permettre aux ministères et aux organismes gouvernementaux de rendre compte de leurs activités à l’Assemblée législative et à la population en général. Il est l’élément clé qui permet d’évaluer les résultats obtenus par un ministère ou un organisme gouvernemental, par rapport à ses objectifs et à ses plans d’action. 2.8 La directive souligne la nécessité de faire rapport chaque année. Elle reconnaît également le lien entre les objectifs, les plans d’action et les résultats finals. Le respect de la directive crée un cadre de base pour la reddition de comptes, la prise de mesures ciblées et une amélioration générale. L’importance de ces trois résultats est expliquée ci-dessous. De l’information pour demander des comptes au gouvernement 2.9 Le premier résultat est de fournir à l’Assemblée législative et au public suffisamment d’informations pour être en mesure de demander des comptes au gouvernement. Pour ce faire, un cycle redditionnel doit faire en sorte que le gouvernement explique en début d’exercice ce qu’il a l’intention d’accomplir et, en fin d’exercice, la mesure dans laquelle il a réussi. En l’absence d’objectifs ou de cibles de rendement, tout résultat peut être considéré comme acceptable. Le personnel administratif sera axé sur les résultats 2.10 Le deuxième résultat est que l’administration sait où porter son attention, et il s’agit à mon avis du plus important des avantages. Si des buts et objectifs et des cibles de rendement sont établis dans chaque ministère et que le personnel sait que les résultats feront l’objet d’un rapport annuel, la motivation est forte pour organiser les ressources, examiner les programmes et centrer la prise de décisions de façon à obtenir des résultats positifs. Même si le personnel sera toujours tenu de s’occuper des questions pressantes au fur et à mesure qu’elles surviennent, des buts et objectifs et des cibles de rendement sont nécessaires pour que le programme ou le ministère garde le cap à long terme. Les lacunes seront cernées et des mesures correctives seront prises 2.11 Le troisième résultat qui découle de la communication d’informations sur l’atteinte des objectifs et des cibles de rendement est la nécessité d’établir un plan d’action lorsque des lacunes sont constatées. Il est vrai que nous avons tendance à mesurer le succès en fonction de l’atteinte d’objectifs ou de cibles, mais je crois qu’il serait extrêmement positif pour le gouvernement, le cas échéat, de reconnaître que les choses ne se sont pas déroulées comme il l’avait prévu et d’expliquer les mesures correctives qu’il entend prendre. Ainsi, les contribuables peuvent être assurés que les objectifs sont toujours le point de mire, même si, au départ, les résultats n’ont pas comblé les attentes. 2.12 La directive exige que les rapports annuels soient rédigés dans une langue claire et simple. Pour souligner l’importance de la présentation rapide de l’information, la directive exige aussi que les rapports soient achevés au plus tard le 1er novembre suivant le 31 mars de l’exercice précédent. 2.13 Au cours des huit dernières années, mon bureau a consacré beaucoup d’efforts à deux aspects dans le domaine, soit mesurer la conformité réelle du gouvernement à la directive, et encourager une conformité accrue. Pris dans leur ensemble, les résultats sont décevants. Mesure de la conformité du gouvernement à sa directive en matière de rapports 2.14 En 1999, nous avons examiné le rapport annuel de 15 ministères qui présentaient des objectifs et des indicateurs du rendement dans Indicateurs de rendement – Supplément du budget principal pour l’exercice terminé le 31 mars 1998. Ce supplément a été déposé en même temps que le Budget principal, de sorte que l’Assemblée législative et le public ont pu voir ce que chacun des 15 ministères tentait d’accomplir avec les sommes qu’il demandait. Par exemple, le ministère de l’Environnement poursuivait des objectifs en matière de qualité de l’air, de qualité de l’eau et de gestion des déchets. De plus, chaque objectif comportait deux mesures du rendement. Nous considérons ce supplément du Budget principal comme un document redditionnel valable. Voici ce qu’on peut lire dans la préface du supplément : Les indicateurs de rendement montrent la mission et les objectifs des ministères et relient leur mandat aux buts stratégiques du gouvernement. Ces mesures comportent des buts atteignables, quoique difficiles à réaliser, pour lesquels les ministères doivent rendre des comptes. 2.15 À la suite de notre travail en 1999, nous avions conclu que des améliorations étaient observées dans le degré de conformité à la directive sur les rapports annuels et que ce système de mesure du rendement au Nouveau-Brunswick continuait à s’élargir et à s’améliorer chaque année. Nous avions également noté que « tous les rapports des ministères énoncent des buts et des objectifs sous une forme reconnaissable » et que « tous les rapports examinés contiennent une rubrique dans laquelle sont exposés les principaux indicateurs du rendement pour l’exercice ». 2.16 Depuis 1999, nous avons effectué de nombreuses vérifications au cours desquelles nous avons examiné la conformité à la directive sur les rapports annuels. Même si ces vérifications n’étaient pas exclusivement axées sur la présentation d’informations concernant le rendement, nous cherchions certainement à savoir si les éléments clés de la directive étaient respectés. Par exemple, des buts et des objectifs sont-ils mentionnés? Les résultats réels sont-ils communiqués et sont-ils comparés aux objectifs et aux cibles? Dans la plupart des vérifications, nous avons constaté un manque de conformité à la directive. Il y manquait des renvois aux objectifs, ce qui, bien entendu, empêche la comparaison des résultats et des objectifs. Un exemple est notre vérification de la gestion des terres de la Couronne en 2001, à l’issue de laquelle nous avions conclu que « L’établissement de buts mesurables est la première étape de l’amélioration du rapport annuel. Les informations présentées dans le rapport annuel actuel ne suffisent pas pour montrer comment le ministre s’acquitte de ses quatre responsabilités que sont l’aménagement, l’utilisation, la protection et la gestion intégrée des ressources des terres de la Couronne du Nouveau-Brunswick ». 2.17 De façon générale, nous avons constaté que l’Assemblée législative et le public ne reçoivent pas l’information exigée par la directive. Et rien n’indique que les ministères s’efforcent d’atteindre des objectifs et des cibles de rendement. 2.18 La préface du supplément précise ce qui suit : Les ministères rendront compte chaque année dans les rapports annuels des progrès faits dans la réalisation des objectifs, ce qui les rend responsables devant le gouvernement, l’Assemblée législative et en fin de compte la population du Nouveau-Brunswick. 2.19 Le Supplément du Budget principal a fait partie du processus budgétaire durant quatre exercices, puis il a été abandonné après l’exercice 1999-2000. Encourager le gouvernement à mieux se conformer à la directive sur les rapports 2.20 En 2001, j’ai pris l’initiative d’examiner tous les rapports annuels des ministères et de reconnaître officiellement celui qui satisfaisait le mieux aux exigences de la directive et qui communiquait un niveau élevé d’informations équitables et équilibrées. J’ai entrepris un tel projet pour tenter d’accroître la visibilité de ces rapports et encourager leur utilisation, tant par les ministères qui sont tenus de rendre des comptes que par les législateurs à qui ils sont redevables. Je m’étais engagé à poursuivre ce projet durant une période de trois ans. En 2004, j’ai décidé de le prolonger d’une autre année. 2.21 Alors que les rapports n’ont jamais été d’une grande qualité, nous avons quand même pu décerner un prix pour le meilleur rapport annuel chacune des trois premières années. Toutefois, pour la quatrième année, aucun des rapports que nous avons examinés n’était de qualité acceptable, et nous avons décidé de ne pas choisir un gagnant. Nous avions reçu les rapports annuels de seulement 9 ministères sur 18 à notre date limite du 3 décembre, et aucun n’était digne d’être reconnu. Seulement deux rapports avaient été déposés avant le 1er novembre, la date limite fixée dans la directive. 2.22 Il est impératif que le gouvernement fournisse une information de meilleure qualité à l’Assemblée législative et au public afin d’expliquer ce qu’il accomplit avec les fonds qu’il dépense. L’Assemblée législative a besoin d’une information de meilleure qualité pour tenir le gouvernement responsable de ses actes. Et l’administration des ministères a besoin de savoir que ses objectifs et ses buts sont importants et qu’il en sera fait rapport. 2.23 Le 26 mai 2005, j’ai noté que le ministère de l’Éducation a communiqué aux médias son premier rapport d’étape sur le Plan d’apprentissage de qualité. Le rapport fixe des cibles pour sept objectifs différents, décrit les progrès accomplis jusqu’à présent et donne une brève description des mesures qui seront prises pour que les progrès se poursuivent. Il s’agit d’un excellent document, mais seul le temps dira s’il continuera à faire partie du rapport redditionnel annuel que le ministère dépose à l’Assemblée législative. Encourager une meilleure communication des résultats financiers par le gouvernement 2.24 Au cours des huit dernières années, j’ai aussi commenté la communication par le gouvernement de ses résultats financiers. La présentation de l’information en temps opportun demeure un problème; d’ailleurs, dans mon rapport annuel de 2004, j’ai noté que les résultats financiers ont été publiés sept fois en novembre ou en décembre au cours des 11 derniers exercices. Je demande que cette situation s’améliore considérablement, parce que les législateurs et les citoyens ne devraient pas avoir à attendre plus de sept mois après la clôture de l’exercice pour savoir comment leur argent a été dépensé et si l’exercice enregistrera un excédent ou un déficit. 2.25 Les résultats financiers annuels sont mieux expliqués. L’an dernier, un commentaire enrichi de graphiques expliquait la position de la province en rapport avec la dette nette, et, depuis quelques années, un texte explique les écarts entre les prévisions budgétaires et les résultats réels. Cependant, beaucoup reste à faire, et j’incite le gouvernement à étudier les pratiques exemplaires en vigueur ailleurs au Canada et à suivre les conseils sur la discussion et l’analyse financières publiés par le Conseil sur la comptabilité dans le secteur public de l’Institut Canadien des Comptables Agréés. Le rôle de l’Assemblée législative 2.26 Pour obtenir que le gouvernement rende des comptes, l’Assemblée législative, par l’entremise du Comité des comptes publics et du Comité des corporations de la Couronne, devrait profiter de ses réunions avec les ministères et les organismes de la Couronne pour se renseigner sur les résultats par rapport aux objectifs et aux cibles. Les questions suivantes devraient être posées : • Quels sont les objectifs et les cibles de rendement? • Quel est le mécanisme en place pour veiller à ce que les objectifs et les cibles de rendement soient suffisamment ambitieux? • S’il n’y a pas d’objectifs ou de cibles, pourquoi et quand seront- ils déterminés? • Comment les résultats réels se comparent-ils à ce qui avait été prévu? • Là où des lacunes ont été observées, quelles mesures sont prévues? Respect des mesures législatives 2.27 La fonction la plus importante d’un gouvernement, et donc de l’Assemblée législative, est le dépôt et la modification de mesures législatives. Il est courant que le succès d’une session de l’Assemblée législative soit mesuré en fonction du nombre de mesures législatives qui sont adoptées. Mais ces mesures législatives sont-elles respectées? Atteignent-elles leurs objectifs? Sont-elles toujours pertinentes? 2.28 Dans leur rôle d’intendance, les gouvernements ont la responsabilité de s’assurer que, sous leur vigilance, les mesures législatives demeurent pertinentes, atteignent leurs objectifs et sont respectées. Voilà des aspects au sujet desquels j’ai noté des lacunes importantes. 2.29 Dans de nombreux cas au cours des huit dernières années, nos vérifications ont consisté à déterminer si les programmes respectaient les mesures législatives. Donc, les lacunes que nous avons relevées dans nos vérifications sur la salubrité des aliments (1999), la qualité de l’eau des puits domestiques (2000), les inspections environnementales (2002), le bureau du prévôt des incendies (2002), les installations de garderie (2003) et les services des foyers de soins (2004) étaient pour la plupart des manquements aux lois ou aux règlements. De plus, au cours de ces vérifications, il était courant de trouver des exemples où les mesures législatives n’avaient pas été suivies. 2.30 En 2000, mon bureau a réalisé au ministère de l’Agriculture et de l’Aménagement rural une vérification qui a porté uniquement sur l’aspect législatif. Nous voulions déterminer si des mécanismes et des méthodes appropriés étaient en vigueur pour assurer la conformité aux mesures législatives et pour mesurer l’efficacité des mesures législatives et en faire rapport. Nous tentions également de voir si les ressources affectées à la mise en application des mesures législatives étaient gérées en tenant compte des principes d'économie et d'efficience. 2.31 Nous avions observé, à la suite de notre travail, qu’aucun rapport n’avait été fait à l’Assemblée législative sur l’efficacité des mesures législatives que nous avions examinées. De plus, l’Assemblée législative n’avait pas reçu de rétroactions sur la performance du ministère pour ce qui est de sa mise en application des mesures législatives qui lui sont confiées. Nous avions recommandé que l’Assemblée législative reçoive des rapports écrits réguliers sur l’efficacité avec laquelle les mesures législatives réalisent leur objet, et que le ministère se serve de son rapport annuel pour informer l’Assemblée législative de son degré de réussite dans la mise en application des mesures législatives dont il assume la responsabilité. J’avais alors déclaré que ce genre de rapport à l’échelle du gouvernement donnerait lieu à une attention soutenue portée aux mesures législatives ainsi qu’à une conformité et à une efficacité accrues. 2.32 Le respect des mesures législatives est un principe fondamental de l’acte de gouverner. Veiller à ce que les mesures législatives demeurent efficaces dans la réalisation de leur objet est une responsabilité fondamentale du gouvernement. Pour bien remplir sa responsabilité en matière de surveillance, le gouvernement devrait accorder une grande priorité au respect des mesures législatives et affecter les ressources nécessaires à cette fonction; sinon, il devrait modifier les mesures législatives de façon à supprimer les responsabilités qu’il n’est plus en mesure d’assumer. Le rôle de l’Assemblée législative 2.33 Le Comité des comptes publics demande des comptes aux ministères, et le Comité des corporations de la Couronne demande des comptes aux organismes de la Couronne. Les comités devraient poser des questions telles que celles-ci : • Quelles sont les mesures législatives dont vous êtes responsables? • Avez-vous des mécanismes en place pour assurer le respect de ces mesures législatives? • Les mesures législatives sont-elles respectées? • Avez-vous des fonds suffisants pour surveiller le respect des mesures législatives? • Les mesures législatives demeurent-elles pertinentes? Évaluation des programmes 2.34 Selon le Budget principal de 2005-2006, le budget des dépenses de la province est de l’ordre de 6,1 milliards de dollars, dont la majeure partie est dépensée par l’entremise des programmes. Le Plan de médicaments sur ordonnance, le programme de gestion des récipients à boisson, le développement régional, la gestion des terres de la Couronne et des centaines d’autres programmes se disputent des ressources publiques limitées. Les législateurs, les hauts fonctionnaires du gouvernement, les gestionnaires de programmes et le personnel doivent régulièrement prendre des décisions à propos de ces programmes. 2.35 Les programmes offerts par les ministères et les organismes du gouvernement provincial ne sont pas statiques. Les politiques et les priorités du gouvernement changent. Des programmes sont mis à l’essai. De nouveaux programmes sont créés. Des programmes établis sont restructurés ou abolis. Les niveaux de financement de chaque programme fluctuent. 2.36 La population est en droit de s’attendre à ce que les programmes financés au moyen de ses taxes et impôts produisent des résultats publics souhaitables (p. ex. : amélioration de la santé, du style de vie et du bien-être économique de la population du Nouveau- Brunswick). De plus, le gouvernement a la responsabilité de bien gérer les ressources qui lui sont confiées. Il est d’une importance vitale que les programmes qui sont financés soient pertinents, atteignent leurs objectifs et offrent un bon rapport coût-efficacité. Les décisionnaires doivent faire des choix judicieux pour assurer l’optimisation des ressources affectées aux programmes. Sinon, cela peut signifier que des possibilités de programme de plus grande valeur pour le public ne seront jamais concrétisées. 2.37 L’importance de l’évaluation des programmes est reconnue dans la directive sur les rapports annuels du gouvernement, qui exige l’inclusion de certaines informations en matière d’évaluation dans les rapports annuels des ministères. Les ministères et les organismes doivent exposer clairement leurs objectifs généraux et spécifiques ainsi que leurs indicateurs de performance. Le rapport devrait préciser dans quelle mesure les programmes existants demeurent pertinents et si les objectifs ont été atteints. Il devrait également rendre compte de l’accueil que le groupe cible a réservé aux programmes. 2.38 Au cours des huit dernières années, nous avons examiné la conformité à cette directive dans le cadre de nombreuses vérifications. Dans la grande majorité des cas, les rapports annuels n’ont pas adéquatement traité de la pertinence des programmes, de l’atteinte des objectifs et de l’accueil des programmes par les groupes cibles. Voici deux exemples. 2.39 En 2003, nous avons effectué une vérification des programmes de dépenses fiscales. Les dépenses fiscales peuvent être considérées comme une aide financière accordée à certains groupes de contribuables ou comme un incitatif financier qui encourage certains comportements parmi les contribuables, par exemple l’exonération de la taxe sur l’essence et les carburants pour les agriculteurs et les pêcheurs ou les crédits d’impôt sur le revenu des sociétés qui produisent des films dans la province. Les programmes de dépenses fiscales que nous avons examinés n’avaient pas d’objectifs mesurables pour indiquer les attentes vis-à-vis du programme, il n’y avait aucun processus officiel en vigueur pour guider la surveillance et l’évaluation du programme, et il n’y avait pas de rapport public sur l’efficacité du programme. 2.40 En 2004, nous avons fait rapport d’une vérification que nous avions effectuée à la Société de développement régional. Notre objectif était de « déterminer si la Société de développement régional a adopté des méthodes satisfaisantes pour mesurer l'efficacité des programmes et des projets financés par le gouvernement provincial qu’elle administre et en faire rapport ». Notre conclusion était que non. Une des raisons fondamentales de cette situation était que des objectifs mesurables n’avaient pas été fixés au départ. Ainsi, un consultant engagé par la société pour évaluer le Fonds pour le développement économique de la Péninsule acadienne et les 23 millions qu’il avait dépensés a observé dans son rapport que, malheureusement, aux fins de son évaluation, l’initiative en soi ne comportait pas de cadre d’évaluation et n’avait pas établi d’indicateurs de succès pour les différents objectifs. 2.41 En 2004, nous avons aussi effectué une vérification qui portait sur l’évaluation de programmes au gouvernement. Dans le cadre de notre travail, nous avions envoyé un questionnaire à 18 ministères afin de déterminer quelle était leur approche en matière d’évaluation de programmes. Parmi nos observations, nous avons noté que des ressources limitées semblaient entraver la capacité des ministères d’améliorer leur évaluation de programmes et qu’un déséquilibre semblait existait dans la capacité des différents ministères de procéder à l’évaluation des programmes. Nous avons noté également que les décisionnaires n’avaient pas aussi facilement accès à l’information sur l’efficacité (c.-à-d. la comparaison des résultats réels et des résultats visés et les résultats de l’évaluation officielle des programmes) qu’aux formes plus traditionnelles de données sur les programmes tels que des rapports numériques et des rapports financiers. 2.42 Là où je veux en venir, c’est que l’argent des contribuables ne devrait pas être dépensé sans que les objectifs recherchés soient clairement établis, et il n’est pas approprié que des programmes soient maintenus sans faire régulièrement l’objet d’un examen critique. Est-il logique que le gouvernement perçoive des recettes fiscales supplémentaires des contribuables s’il n’est pas en mesure de montrer que les fonds qui sont perçus à l’heure actuelle servent à financer des programmes qui sont pertinents, qui atteignent leurs objectifs et dont l’accueil par les groupes de clients cibles demeure positif? Une bonne intendance l’exige. Les contribuables doivent être assurés de l’optimisation des ressources. 2.43 Vu l’utilité pour la prise de décisions de l’information tirée de l’évaluation des programmes et les possibilités d’amélioration que suggèrent les réponses à notre questionnaire de 2004, notre bureau a l’intention d’effectuer plus de travail dans ce domaine. La prochaine étape consistera à voir comment certains programmes administrés par le ministère de la Santé et du Mieux-être sont évalués. Le rôle de l’Assemblée législative 2.44 Pour obtenir que le gouvernement en place rende des comptes, les députés de l’Assemblée législative devraient recevoir de l’information pertinente au moyen de rapports annuels sur les divers programmes offerts par le gouvernement. Cette information devrait être présentée d’une manière qui permette de conclure si oui ou non le programme devrait être maintenu dans sa forme actuelle. En l’absence de cette information, des questions appropriées doivent être posées, par exemple : • À quelle fréquence a lieu l’évaluation du programme? • Quelles preuves avez-vous de la pertinence continue du programme? • Quels sont les résultats du programme? • Combien coûte l’atteinte de ces résultats? • Existe-t-il d’autres moyens plus efficaces et peut-être moins coûteux de fournir le programme? Surveillance adéquate des organismes de la Couronne 2.45 La quantité de services gouvernementaux qui sont fournis au Nouveau-Brunswick par des organismes de la Couronne est considérable. Par exemple, huit régies régionales de la santé assument la prestation d’une grande part des soins de santé fournis dans la province. Par ailleurs, des organismes de la Couronne ont été créés pour s’occuper de la distribution des produits alcoolisés, de la satisfaction des besoins en électricité et de la prestation des programmes de développement régional. Les états financiers du gouvernement mentionnent environ 35 organisations qui sont responsables de la prestation de services gouvernementaux et qui sont donc redevables à l’Assemblée législative. Au 31 mars 2004, ces organisations détenaient des actifs publics de plus de 5,3 milliards de dollars. Le passif correspondant dépassait les 5,0 milliards. De plus, le gouvernement a recours à la Société de gestion des placements du Nouveau-Brunswick pour gérer des actifs de caisse de retraite de plus de 5 milliards de dollars. 2.46 Il est d’une importance extrême que ces organismes comprennent ce qui est attendu d’eux et que le gouvernement joue un rôle de surveillance adéquat pour veiller à ce que les organismes répondent aux attentes. Mon bureau s’intéresse grandement à ces questions et, entre 1996 et 2000, il a effectué les examens de gouvernance suivants. Un examen général de différents organismes de la Couronne du Nouveau-Brunswick (1996) La Société des loteries de l’Atlantique Inc. (1997) Les huit corporations hospitalières régionales (1998) La Société des alcools du Nouveau-Brunswick (1999) Le ministère des Finances – caisses de retraite (2000) 2.47 Plus récemment, en 2003, reconnaissant l’importance financière de ces organismes et les nombreux changements récents apportés aux pratiques exemplaires dans le domaine de la gouvernance, nous avions réalisé un autre examen de la gouvernance des organismes de la Couronne. Notre objectif était de résumer les résultats de nos examens de la gouvernance des cinq dernières années, d’examiner des pratiques en vigueur ailleurs et de formuler d’importantes recommandations générales sur les mesures que la province peut prendre pour améliorer la gouvernance des organismes de la Couronne. Nous avions aussi interviewé des représentants de certains organismes de la Couronne du Nouveau-Brunswick et du Bureau du Conseil exécutif du Nouveau-Brunswick. Enfin, nous avions examiné les documents de différents organismes de la Couronne et effectué des contrôles par sondages limités sur de récentes nominations aux conseils des organismes de la Couronne du Nouveau-Brunswick. Les résultats de notre travail ont révélé de nombreuses lacunes graves. 2.48 Traditionellement, le gouvernement n’a pas particulièrement bien communiqué son interprétation du mandat et des attentes en matière de rendement des organismes de la Couronne. De nombreux représentants des organismes de la Couronne avec lesquels nous nous sommes entretenus ont déclaré que la communication avec le gouvernement central aux fins de déterminer les priorités du gouvernement était un problème de longue date. Dans un cas, un représentant d’un organisme de la Couronne nous a dit tenter de « lire dans le marc de café » ce que le gouvernement attendait de l’organisme tant pour le mandat que pour le rendement. 2.49 Dans notre travail de 2003 sur la gouvernance, nous notions que, même si les plans d’activités de certains organismes de la Couronne faisaient l’objet d’un examen par le Conseil de gestion, ce n’était pas le cas pour de nombreux autres. Le Conseil de gestion ni personne d’autre du gouvernement central ne passaient en revue les plans stratégiques des organismes de la Couronne. Outre ces deux observations importantes, nous avions formulé 19 recommandations allant du processus de nomination des membres des conseils à des améliorations aux rapports redditionnels annuels. Il ne fait aucun doute que l’adoption de telles recommandations améliorera notre culture de gouvernance au gouvernement, mais, plus important encore, améliorera la reddition de comptes et, au bout du compte, le rendement du gouvernement. Le rôle de l’Assemblée législative 2.50 L’Assemblée législative, par l’entremise de son Comité des corporations de la Couronne, doit s’assurer que les différents organismes de la Couronne font l’objet d’une surveillance adéquate. Alors que les organismes de la Couronne doivent rendre compte de leurs actions, le gouvernement a la responsabilité de clairement énoncer ce qu’il attend d’eux. Si des informations sur leurs plans d’activités, leurs objectifs et leurs cibles de rendement ne sont pas communiquées dans leur rapport annuel, alors les députés de l’Assemblée législative doivent être prêts à obtenir des réponses à des questions telles que celles-ci : • Connaissez-vous les attentes du gouvernement? • Ces attentes sont-elles exigeantes pour votre secteur d’activité? • Dans quelle mesure répondez-vous aux attentes du gouvernement? • Quels sont vos projets dans les domaines qui nécessitent des améliorations? Suggestions pour améliorer le rôle du Comité des comptes publics et du Comité des corporations de la Couronne 2.51 Depuis quelques années, mon bureau collabore étroitement avec le Comité des comptes publics et le Comité des corporations de la Couronne. Depuis l’automne 2003, un membre du personnel assiste à la plupart des réunions afin de tenir notre bureau informé des questions soulevées et des décisions prises. À la suite de notre association avec ces comités, nous avons proposé plusieurs améliorations. Dans les paragraphes qui suivent, j’en souligne trois. Documenter le mandat ou le cadre de référence 2.52 Les comités ont peu de ressources pour les conseiller sur ce qu’ils sont censés faire. Ainsi, l’article 93 du Règlement de l’Assemblée législative déclare ce qui suit au sujet du Comité des comptes publics. « Les rapports du vérificateur général à la Chambre, ainsi que les comptes publics, sont renvoyés automatiquement au Comité des comptes publics. » Il s’agit de la seule mention officielle du Comité des comptes publics. Au cours des années, la pratique et la tradition ont dicté le rôle de ces comités. 2.53 L’Assemblée législative doit établir un mandat ou un cadre de référence clair qui traduit adéquatement ce qui est attendu de ces comités pour ce qui est de demander des comptes au gouvernement au nom du public. 2.54 Nous avons observé que le sujet des questions et des préoccupations des députés, tant au Comité des comptes publics qu’au Comité des corporations de la Couronne, touchait souvent aux mêmes thèmes. Ces thèmes pourraient être compris dans un mandat ou un cadre de référence documenté pour les deux comités. En voici des exemples : • le degré de conformité aux dispositions sur la reddition de comptes de la directive sur les rapports annuels; • la perception et un traitement comptable approprié de toutes les recettes fiscales et autres recettes payables aux ministères et aux organismes; • le maintien des dépenses dans les limites et aux fins autorisées par l’Assemblée législative; • la suffisance des mesures de sauvegarde visant à protéger les biens contre les pertes, le gaspillage et les détournements de fonds; • le souci de l’économie dans l’acquisition des biens et des services; • l’efficacité avec laquelle les programmes atteignent leurs objectifs énoncés. 2.55 La documentation de ces thèmes contribuerait à renforcer le cadre qui sous-tend les délibérations des comités. Cela aiderait également les ministères et les organismes à comprendre la portée des questions qui peuvent être posées et l’éventail des sujets discutés. Améliorer le processus de rapport des comités 2.56 À l’heure actuelle, le Règlement exige que chaque comité prépare un rapport écrit. Il n’y a toutefois aucune exigence portant sur le contenu du rapport. Nous avons examiné le rapport le plus récent de chaque comité et constaté qu’il s’agit simplement de rapports d’activité indiquant quels ministères ou organismes ont comparu. Aucune recommandation n’est faite à l’Assemblée législative, et aucun suivi des rapports précédents n’a lieu. 2.57 La pertinence et l’influence des comités seraient grandement rehaussées si les rapports de comité contenaient des recommandations à l’intention de l’Assemblée législative. Nous envisageons au moins deux sources pour ces recommandations. L’une pourrait être le résultat des observations soumises durant les réunions du comité, et une autre pourrait être l’adoption des recommandations formulées dans le rapport du vérificateur général. 2.58 À notre avis, les rapports soumis par les comités auraient une plus grande valeur pratique si l’Assemblée législative au complet traitait et débattait des questions découlant des réunions de comité. L’Assemblée législative pourrait demander au gouvernement de mettre en œuvre les recommandations qu’elle reçoit de ses comités. Une procédure de suivi efficace serait nécessaire pour déterminer si des mesures ont été prises pour donner suite aux recommandations. Soutien des travaux des comités 2.59 Les comités ont besoin d’aide spécialisée et de personnel de soutien pour s’acquitter de leurs affaires. Ces services sont importants pour renforcer la capacité de surveillance des deniers publics. 2.60 La quantité d’informations et de connaissances que doit posséder chaque membre de comité pour demander des comptes à un organisme ou à un ministère est énorme, ce qui nous est apparu évident au cours des travaux des deux comités que nous avons observés durant la dernière année. 2.61 Nous avons constaté que, malgré le volume d’information à obtenir et aux nombreuses fonctions dont s’acquittent les comités, ils ne disposent d’aucun personnel de recherche permanent. Nous avons remarqué que, dans d’autres gouvernements, des recherchistes aident les comités à se préparer pour leurs délibérations et à rédiger leurs rapports. L’Ontario est un bon exemple d’une telle pratique. À notre avis, l’efficacité des comités en question pourrait être améliorée si du personnel de recherche non partisan était engagé pour aider les comités à faire leur travail. Soutien de la Commission sur la démocratie législative 2.62 J’ai accueilli avec plaisir les recommandations de la Commission sur la démocratie législative visant à rehausser le rôle des députés et de l’Assemblée législative. En particulier, la commission recommande que le rôle des comités législatifs dans l’élaboration des politiques soit renforcé en leur fournissant un personnel et des ressources désignés. La commission recommande également la création et le financement d’un bureau de recherche indépendant de la bibliothèque législative pour servir l’ensemble des députés et soutenir le rôle de comités législatifs renforcés. Enfin, la commission demande qu’une période soit réservée aux deux semaines pour débattre les rapports des comités de l’Assemblée législative. 2.63 J’espère que nos suggestions auront des suites, de même que celles formulées par la Commission sur la démocratie législative.