Contexte 3.1 Les législateurs consacrent une bonne partie de leur temps à l'Assemblée législative à débattre de propositions de nouvelles mesures législatives et de modifications aux mesures existantes. Après avoir déterminé la nécessité d'adopter des mesures législatives dans un domaine en particulier, les législateurs ont ensuite la responsabilité de voir à ce que les dispositions qu'ils en viennent à adopter soient efficaces pour atteindre les objectifs visés. En conséquence, les législateurs doivent être tenus responsables de l'élaboration d'un cadre législatif qui répond efficacement au besoin cerné. 3.2 À titre de responsables de la mise en application des mesures législatives, les ministères ont un rôle essentiel à jouer pour s’assurer que les mesures atteignent effectivement les objectifs visés. Les ministères auxquels des mesures législatives sont affectées doivent donc être tenus responsables de leur mise en application efficiente et efficace dans les limites du cadre établi par ces mesures. 3.3 Au cours des deux ou trois dernières années, nous avons fait part de nos préoccupations relatives au fait que les mesures législatives ne sont pas toujours observées au sein du gouvernement. Nous avons signalé plusieurs cas de non-respect de dispositions législatives dans nos récents rapports du vérificateur général. Par exemple, le conseil d'administration de la Société des alcools du Nouveau-Brunswick n'a pas choisi son président-directeur général, alors que la Loi sur la Société des alcools du Nouveau-Brunswick le lui autorise. Dans un autre cas, la Loi sur l'administration financière exige que tous les marchés conclus par le gouvernement soient présentés au contrôleur, ce qui n'est pas fait. Le travail dont il est fait rapport dans le présent chapitre fait suite, en partie, à de telles préoccupations. 3.4 Un examen des mesures législatives aurait pu être effectué dans n'importe quel ministère. Cependant, un examen préliminaire du ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural nous a révélé que le ministère est responsable de l'application de 30 à 40 mesures législatives, beaucoup plus que tout autre ministère. Des représentants du ministère se préoccupent de l'efficacité de certaines mesures et des ressources dont le ministère dispose pour les mettre en application. Étant donné que les ressources sont limitées, nous étions d'avis que le risque de problèmes d'efficacité et de mise en application de chaque mesure législative se trouvait considérablement accru en raison du grand nombre de lois et de règlements dont le ministère assume la responsabilité. En conséquence, nous avons décidé de concevoir un projet fondé sur l'examen d'un échantillon de mesures législatives mises en application par le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural. 3.5 Bien que les mesures législatives examinées dans le cadre de ce projet soient toutes la responsabilité du ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural, nous croyons que les constatations de notre examen ont une portée plus large. À notre avis, les mesures législatives que nous avons examinées représentent un échantillon transversal valable de la législation provinciale. Nous croyons donc que les recommandations générales que nous formulons dans le présent chapitre ne se limitent pas au ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural et pourraient s'appliquer à tous les ministères. 3.6 Suivant l'achèvement de l'étape de la réalisation de l'examen, le gouvernement a annoncé une réorganisation majeure des ministères. La majorité des mesures législatives dont le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural s'occupait passeront probablement sous la responsabilité du nouveau ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Aquaculture. Toutefois, étant donné l'incertitude entourant l'affectation de la responsabilité des mesures législatives que nous avons examinées, nous renvoyons tout au long du chapitre à l'ancien ministère. Étendue 3.7 Nous avions, pour notre examen des mesures législatives dont le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural avait la responsabilité, les objectifs suivants : Déterminer si des mécanismes et des méthodes appropriés sont instaurés pour : • assurer le respect des mesures législatives; • mesurer l'efficacité des mesures législatives et en faire rapport; • faire en sorte que les ressources affectées à la mise en application des mesures législatives sont gérées en tenant compte des principes d'économie et d'efficience. 3.8 Dans ce chapitre, nous entendons par efficacité le degré auquel les préoccupations ayant mené à l'élaboration de la mesure législative sont résolues dans le cadre législatif établi. 3.9 Le projet de vérification a consisté notamment à évaluer le degré auquel le ministère réussit à assumer les responsabilités administratives qui lui sont conférées par les mesures législatives dont il est chargé. Nous avons aussi tenté de déterminer si les résultats sont adéquatement mesurés et communiqués à l'Assemblée législative. 3.10 Comme nous voulions mener un examen en profondeur, nous avons décidé de nous pencher sur six mesures législatives. Nous avons choisi une combinaison de mesures plus récentes et plus anciennes qui visent divers domaines d'activités du ministère et de l'industrie agricole en général. En plus d'étudier les lois et les règlements choisis, nous avons interviewé des membres du personnel ministériel, examiné de la documentation connexe et effectué des vérifications du cheminement par sondage limité et d'autres essais sur les systèmes administratifs. Résumé des résultats Généralités 3.11 Aucune des six mesures législatives étudiées ne comprend un article sur l'objet de la mesure, qui aiderait les lecteurs à comprendre pourquoi cette loi a été mise en vigueur ou qui leur donnerait des points de repère en rapport avec lesquels mesurer le degré de réussite de cette loi. Nous recommandons que soit clairement énoncé l'objet de toute mesure législative nouvelle ou modifiée. 3.12 Il n'a pas été fait rapport à l'Assemblée législative d'informations sur l'efficacité d'aucune des six mesures législatives que nous avons examinées. Nous recommandons que l'Assemblée législative reçoive des rapports écrits réguliers sur l'efficacité avec laquelle les mesures législatives réalisent leur objet. Ces rapports devraient comprendre des observations sur toutes les mesures législatives mises en application par le ministère. 3.13 Aucun calendrier d’examens réguliers des six mesures législatives que nous avons étudiées n'est établi. De tels examens permettraient de cerner les aspects qui posent problème dans la mise en application, le respect et l'exécution des lois en question et de proposer les mesures à prendre pour améliorer la situation. Nous avons toutefois noté que cinq des six mesures avaient fait l'objet de révisions plus ou moins approfondies au cours des dernières années, dont certaines étaient très détaillées. Seule la Loi sur l'inspection des ruchers n'a pas été revue dernièrement, bien que le règlement afférent à cette loi ait été rédigé en 1997. 3.14 Le ministère ne fournit à l'Assemblée législative aucune rétroaction par l'entremise de son rapport annuel sur son degré de réussite dans la mise en application des mesures législatives dont il assume la responsabilité. Comme la mise en application efficace et efficiente des mesures législatives affectées fait partie intégrante des fonctions du ministère, nous sommes d'avis que le ministère devrait faire rapport de son rendement dans le domaine. 3.15 Nous nous demandons si la rationalisation récemment annoncée pour le ministère pourrait signifier une diminution des ressources affectées à la mise en application des mesures législatives étudiées et des autres mesures traitant de questions agricoles. Cette diminution pourrait signifier une efficacité amoindrie des mesures législatives. 3.16 Les représentants du ministère ont mentionné deux cas récents, dont l'un visé par la Loi sur la protection de la couche arable et l'autre, par la Loi sur l'éradication des maladies des pommes de terre, dans lesquels le ministère de la Justice a estimé ne pas être en mesure d'exécuter la loi en dépit de son non-respect manifeste, ce qui fait que la mesure est continuellement défiée. De façon générale, nous sommes d'avis qu'une exécution déficiente de la loi mènera à un degré de non- respect plus élevé qu'il en serait autrement, ce qui en réduit l'efficacité. Observations sur des mesures législatives particulières 3.17 Nous avons constaté que la Loi sur l'inspection des ruchers, la Loi sur la protection de la couche arable et la Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole n'atteignent pas leurs objectifs, selon l'interprétation qu'en fait le ministère. À la lumière de notre examen, nous croyons que ces mesures législatives ne peuvent atteindre leurs objectifs sans l'affectation d'autres ressources au sein du ministère ou l'apport de modifications législatives, ou les deux. 3.18 Nous avons recommandé que le ministère voie si la mesure législative à l'appui de l'industrie de l'apiculture du Nouveau-Brunswick demeure nécessaire et qu'il présente au gouvernement les recommandations pertinentes concernant la Loi sur l'inspection des ruchers et ses règlements. 3.19 Nous avons recommandé que le ministère élabore une solution de remplacement réaliste à l'actuelle Loi sur la protection de la couche arable et à ses règlements afin de mieux réaliser l'objet de la loi. 3.20 Nous avons recommandé que des mesures appropriées soient prises pour améliorer l'efficacité de la Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole afin que la loi atteigne son but de permettre aux agriculteurs de vaquer à leurs activités agricoles sans restrictions indues et de protéger le territoire agricole contre l'étalement urbain. Pour y parvenir, il faudra améliorer la planification de l'utilisation des terres rurales en général, et non se limiter à apporter des modifications à la loi et à ses règlements. 3.21 Nous avons recommandé que le ministère envisage d'étendre la portée de la Loi sur l'élevage du bétail. Mesures législatives examinées 3.22 Dans le cadre du projet, nous avons examiné six mesures législatives mises en application par le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural. Il s'agit des lois suivantes : • Règlement sur les prêts aux agriculteurs débutants afférent à la Loi sur l'aménagement agricole; • Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole et règlement; • Loi sur l'inspection des ruchers et règlement; • Loi sur l'élevage du bétail et règlement; • Loi sur l'éradication des maladies des pommes de terre et règlement; • Loi sur la protection de la couche arable et règlement. 3.23 De nombreuses raisons peuvent expliquer pourquoi une mesure législative n'atteint pas ses objectifs. • La mesure est mal rédigée ou mal conçue. • Les circonstances ont changé depuis la rédaction ou la dernière modification de la mesure. • Les ressources fournies au ministère responsable des activités administratives nécessaires ne sont pas suffisantes. • Le ministère qui en assume la responsabilité n'applique pas la loi de façon appropriée. 3.24 À notre avis, les législateurs peuvent grandement augmenter les chances de succès d'une mesure législative en s'assurant que les trois exigences clés sont satisfaites avant l'approbation de la loi. 3.25 Premièrement, l'objet de la mesure législative doit être clairement énoncé et figurer dans la loi même. Un objet clairement énoncé aide les intervenants à comprendre ce qui est visé et constitue un point de référence qui peut servir à l'évaluation du « succès » de la mesure législative. De plus, avoir un objectif clairement énoncé dans la loi permettra aux futurs législateurs de voir si les objectifs de la mesure sont toujours valides en regard des besoins changeants de la société. 3.26 Deuxièmement, l'Assemblée législative doit s'engager à fournir des ressources suffisantes sur une base continue, par l'entremise du processus d'approbation budgétaire, pour permettre au ministère responsable de mettre efficacement en application la loi et les règlements connexes. Chaque mesure législative adoptée a un coût, tant pour ceux qui doivent s'y conformer que pour ceux qui doivent l'appliquer. La décision de légiférer doit nécessairement être prise en soupesant l'avantage de la mise en vigueur d'une mesure par rapport aux coûts de son application et de son respect. 3.27 Troisièmement, le degré auquel les objectifs de la mesure législative sont atteints doit être communiqué à l'Assemblée législative. Cette rétroaction devrait comporter deux volets distincts. Un rapport sur le degré auquel la mesure législative réussit à atteindre ses objectifs énoncés permettra aux législateurs de déterminer si la mesure a besoin de modifications pour assurer la réalisation de ses objectifs législatifs. Par ailleurs, il sera nécessaire de faire rapport pour montrer que le ministère applique la mesure de façon appropriée. En fournissant à l'Assemblée législative des rétroactions du genre dont il est question dans ce paragraphe, les législateurs pourront s'assurer que les efforts mis dans la rédaction et l'approbation de la mesure législative ont mené aux résultats escomptés. Si ce n'est pas le cas, cela leur permettra de prendre des mesures correctrices. 3.28 Nous traiterons dans ce chapitre des aspects mentionnés ci- dessus ainsi que des domaines qui ont davantage rapport à la mise en application des six mesures législatives que nous avons examinées. L'échantillon retenu parmi les mesures législatives dont le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural a la responsabilité montre que certaines mesures provinciales sont inefficaces. Notre examen s'étant limité à un ministère, nous ne pouvons dire si le problème est courant. En revanche, comme il s'agit d'un domaine très intrinsèque au rôle de l'Assemblée législative, une possibilité même limitée de problèmes devient préoccupante. 3.29 À titre d'illustration, nous présentons dans une annexe à ce chapitre nos observations et nos recommandations détaillées sur l'une des mesures que nous avons examinées, à savoir la Loi sur la protection de la couche arable et son règlement. Cette mesure en particulier n'a pas réussi à atteindre les objectifs qui étaient visés. Objet des mesures législatives 3.30 Aucune des six mesures législatives étudiées ne comprend un article sur l'objet de la mesure, qui aiderait les lecteurs à comprendre pourquoi la loi a été mise en vigueur ou qui leur donnerait des points de repère en rapport avec lesquels mesurer le degré de réussite de la loi. Les membres du personnel du ministère ont interprété à leur manière l'objet de chaque mesure législative et agissent sur la base de ces interprétations. À notre avis toutefois, pour que les législateurs puissent être certains que leurs intentions législatives seront respectées, un bon début serait de présenter dans la mesure un article sur son objet. Ainsi, chaque intervenant aura accès à la même information dès le départ, et cela permettra aux futurs législateurs de voir si l'objet de la mesure législative demeure valable à la lumière de circonstances changeantes. Nous estimons que, pour être efficace, une mesure législative doit être compréhensible et complète. 3.31 La Loi sur la protection de la couche arable illustre bien les problèmes que l'absence d'un d'objet peut entraîner. Cette loi ne comporte aucun énoncé clair de son objet, ce qui a mené le public et d'autres intervenants à faire des interprétations impropres de la portée de la loi (p. ex., le public pense que le gouvernement peut arrêter l'enlèvement de la couche arable en toutes circonstances). La situation a créé beaucoup de confusion et de sentiments négatifs envers le ministère, puisqu'il ne peut satisfaire aux attentes du public. Il n'est dans l'intérêt de personne que les choses soient ainsi. 3.32 Voici un exemple d'une mesure législative provinciale qui contient un article sur son objet. L'article 2 de la Loi sur l'assainissement de l'air spécifie que : L'objet de la présente loi et des règlements est d'appuyer et de promouvoir la protection, la régénération, l'amélioration et l'utilisation judicieuse de l'environnement conformément aux principes suivants 3.33 Suit une description des principes auxquels il doit être adhéré. Nous trouvons que la description de l'objet de la Loi sur l'assainissement de l'air est très claire. Recommandation 3.34 Nous avons recommandé qu'un énoncé clair de l'objet soit compris dans toute nouvelle proposition de mesure législative. Nous avons recommandé également qu'un énoncé de l'objet soit intégré aux mesures législatives en vigueur chaque fois qu'une mesure est modifiée. Réponse du ministère 3.35 Le ministère de la Justice a réagi à la recommandation par les commentaires suivants : En interprétant les lois, les tribunaux ont tendance à s’attarder sur les dispositions importantes de la loi, et pas seulement à tenir compte des éléments descriptifs, pour déterminer le véritable objet et l’intention réelle de la loi. Cela étant dit, et du point de vue juridique, il pourrait s’avérer difficile d’observer votre recommandation. [Traduction.] Rapport sur l'efficacité des mesures législatives 3.36 L'une des fonctions les plus importantes des législateurs est d'étudier et d'approuver des mesures législatives. Cela n'est toutefois pas, à notre avis, une fin en soi. Il s'agit plutôt d'un moyen de réaliser sur une base constante l'objet visé par la mesure législative. Or, les législateurs ont besoin de rétroaction pour déterminer si l'objet visé est effectivement atteint. La rétroaction devrait permettre aux législateurs de s'assurer que les efforts mis dans la rédaction et l'approbation de la mesure législative ont mené aux résultats escomptés. Si ce n'est pas le cas, cela leur permettra de prendre des mesures correctrices. 3.37 À notre avis, la rétroaction devrait comporter deux volets distincts. Le premier serait un rapport sur le degré auquel la mesure législative réussit à atteindre ses objectifs énoncés. Un tel rapport permettrait aux législateurs de déterminer si la mesure a besoin de modifications pour assurer la réalisation de ses objectifs législatifs. Le deuxième volet de cette rétroaction serait le rapport sur les activités administratives menées par le ministère à l'appui de la mesure législative, ce dont nous discutons plus loin dans le chapitre. 3.38 Il n'a été fait rapport de l'efficacité d'aucune des six mesures législatives que nous avons examinées. Un tel rapport est toutefois exigé par au moins une mesure législative provinciale, soit l'article 9 de la Loi sur l'assainissement de l'air, qui précise ce qui suit : Le Ministre doit, chaque année, déposer par écrit un rapport à l'Assemblée législative faisant état du succès rencontré dans la réalisation des objectifs et concernant toute autre question qu'il estime appropriée. 3.39 Bien qu'un rapport annuel sur l'efficacité, comme l'exige la Loi sur l'assainissement de l'air, ne soit peut-être pas nécessaire pour toutes les mesures législatives, nous estimons toutefois que l'Assemblée législative devrait recevoir des rétroactions périodiques sur chaque mesure législative provinciale. Nous croyons qu'un rapport aux trois ou aux quatre ans serait approprié. Recommandation 3.40 Nous avons recommandé que le ministère remette à l'Assemblée législative des rapports écrits réguliers (aux trois ou quatre ans, par exemple) sur l'efficacité avec laquelle les mesures législatives dont il est responsable atteignent les objectifs visés. Examen périodique des mesures législatives 3.41 Aucun calendrier d’examens réguliers des six mesures législatives que nous avons étudiées n’est établi. Toutefois, cinq des six mesures ont fait l'objet de révisions plus ou moins approfondies au cours des dernières années, dont certaines étaient très détaillées. Seule la Loi sur l'inspection des ruchers n'a pas été revue dernièrement, bien que le règlement afférent à cette loi ait été rédigé en 1997. Or, certaines dispositions de cette loi sont de toute évidence désuètes, dont une mention sur l'arrosage de produits contenant de l'arsenic. Des représentants du ministère ont dit que la Loi sur l'inspection des ruchers n'est pas considérée comme une mesure législative prioritaire au ministère, et c'est la raison pour laquelle elle n'a pas été révisée ni mise à jour. Pour notre part, nous croyons que chaque mesure législative devrait faire l'objet d'une révision et d'une mise à jour périodiques pour faire en sorte qu'elle continue à atteindre les objectifs de l'Assemblée législative. Le processus contribuerait également à générer de l'information sur l'efficacité à l'intention de l'Assemblée législative, comme il est discuté dans la section précédente. D'après ce que nous comprenons, le gouvernement fédéral exige la réalisation de telles révisions aux cinq ans. Le coût de ces révisions nécessaires doit être pris en compte dans la décision entourant la rédaction d'une nouvelle mesure législative. Recommandation 3.42 Nous avons recommandé qu'une révision des mesures législatives dont le ministère a la responsabilité soit effectuée périodiquement (à tous les quatre ans, par exemple) pour faire en sorte que les mesures soient à jour, que leurs objectifs énoncés soient toujours valables et qu'elles assurent un cadre efficace dans les limites duquel les objectifs peuvent être atteints. Les résultats de telles révisions devraient être communiqués à l'Assemblée législative. Reddition de comptes ministérielle sur l'atteinte des buts législatifs 3.43 La responsabilité de chaque mesure législative est confiée aux ministères individuels, qui doivent l'appliquer de manière efficace et efficiente. Le ministère rend compte à l'Assemblée législative des résultats de la mise en application de la mesure. 3.44 Outre l'affectation de la responsabilité, l'Assemblée législative a l'obligation de fournir un financement suffisant au moyen des crédits annuels pour permettre au ministère d'appliquer la mesure de façon efficace. Le Manuel des procédures sur la présentation des documents du Conseil exécutif reconnaît cette obligation et précise l'information sur les coûts qui doit accompagner la rubrique des données historiques de la section Mémoire au Conseil exécutif et procédure d'approbation des lois : promulgation des lois nouvelles ou modificatives. Le manuel précise ce qui suit : Considérations financières - L'importance de cette rubrique ne peut être surestimée et tous les efforts devraient être faits pour établir des projections exactes des coûts et des recettes entraînés par la mesure recommandée. Si cela ne peut être fait, il faudrait expliquer clairement pourquoi. Les incidences financières sur d'autres ministères et organismes ainsi que sur des groupes et organisations externes devraient également être mentionnées. Le fait de réunir ces renseignements aidera également à déterminer les incidences en matière de développement économique qui doivent être documentées dans la rubrique Données historiques. Il y aurait lieu d'indiquer le coût, le cas échéant, de la proposition pour l'exercice financier en cours et chacun des deux exercices subséquents. Si les dépenses doivent être engagées dans l'exercice en cours, il faut mentionner le crédit auquel elles seront imputées. L'estimation du coût devrait inclure toutes les dépenses directes et indirectes et devrait tenir compte de toutes les possibilités de recouvrement du coût ou d'accroissement des recettes. Il faudrait indiquer également les économies qui seront réalisées par suite de la mesure proposée durant l'exercice financier en cours et chacun des deux exercices subséquents. 3.45 L'Assemblée législative ne peut tenir un ministère responsable de résultats médiocres si elle ne lui fournit pas des ressources adéquates pour l'application d'une mesure législative. Nous nous demandons si les réductions récemment annoncées pour le ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural rendront la tâche du ministère plus difficile ou même impossible pour ce qui est d'atteindre les objectifs des mesures législatives dont il a la responsabilité. 3.46 Durant notre examen, nous avons noté que, dans deux cas, les directions estimaient que les ressources affectées n'étaient pas suffisantes pour permettre une application convenable des mesures législatives. Dans un cas, soit la Loi sur la protection de la couche arable, la Direction des ressources des terres agricoles estimait que les ressources au ministère étaient insuffisantes, mais que l'ajout de ressources n'améliorerait pas l'efficacité de la mesure sans que soient d'abord apportées d'importantes modifications à la loi. Dans le second cas, soit la Loi sur l'inspection des ruchers, la Direction de la pomme de terre et de l'horticulture a décidé en toute connaissance de cause que la mise en application de cette loi était une priorité moins élevée du ministère que l'application d'autres mesures dont le ministère a la responsabilité. En conséquence, des ressources limitées y ont été consacrées, et le niveau d'activité connexe a été moins intense qu'il ne l'aurait fallu pour assurer la réalisation de son objet. La décision semble résulter de la nécessité d'établir des priorités dans l'affectation des ressources très limitées du ministère. 3.47 Nous sommes d'avis que les situations dans lesquelles les ressources limitées nuisent à la capacité du ministère d'appliquer des mesures législatives devraient être signalées à l'Assemblée législative. Le rapport annuel du ministère semblerait le meilleur véhicule pour transmettre l'information. 3.48 La directive sur les rapports annuels du gouvernement du Nouveau-Brunswick précise que le rapport annuel est le principal document redditionnel des ministères. Étant donné que l'application efficace et efficiente des mesures législatives dont il a la responsabilité fait partie intégrante de ses fonctions, nous estimons que le ministère devrait en faire rapport par l'entremise de son rapport annuel. Une telle tâche nécessiterait l'élaboration d'un objectif stratégique ministériel visant la mise en application des mesures législatives. Des indicateurs du rendement pourraient ensuite être établis pour mesurer le degré auquel l'objectif stratégique est atteint, et des buts pourraient être déterminés pour chaque indicateur du rendement. Les résultats réels de la mise en application des mesures législatives pourraient être comparés aux buts visés, et des explications pourraient être fournies lorsque les buts ne sont pas atteints. L'information serait fournie dans le rapport annuel du ministère. 3.49 Au cours de notre examen, nous avons observé que des indicateurs du rendement n'avaient pas été définis en rapport avec la mise en application des six mesures législatives que nous avons étudiées. Dans la plupart des cas, des statistiques de fonctionnement visant les mesures législatives en question sont fournies dans le rapport annuel de 1998-1999 du ministère, bien que rien ne concerne la Loi sur la protection de la couche arable. Nous convenons que, à l'heure actuelle, certaines mesures font l'objet d'un niveau d'activité assez faible. Toutefois, il serait indiqué d'établir des normes officielles pour les mesures faisant l'objet d'une activité plus intense. Par exemple, le pourcentage de terres agricoles recensées qui sont inscrites à titre de terres agricoles en vertu de la Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole pourrait servir d'indicateur du rendement pour cette loi en particulier. Un pourcentage cible pourrait ensuite être fixé chaque année pour inciter le personnel à promouvoir l'inscription des terres. L'établissement de tels indicateurs et un rapport sommaire sur chacun dans le rapport annuel du ministère permettraient aux lecteurs d'évaluer les activités administratives menées par le ministère à l'appui des mesures législatives dont il a la responsabilité. Sur le plan fonctionnel, cela aiderait le personnel à mettre ses propres activités de travail en ordre de priorité. Recommandations 3.50 Nous avons recommandé que le ministère élabore des indicateurs du rendement qui peuvent servir à évaluer les activités administratives du ministère à l'appui des mesures législatives. 3.51 Nous avons recommandé également que le ministère fasse rapport, dans son rapport annuel, sur ses activités administratives liées aux mesures législatives. Dans les cas où les cibles annuelles ne sont pas atteintes, des explications (conséquences négatives des ressources limitées, par exemple) devraient être fournies. Mécanisme d'exécution du ministère 3.52 Une majorité des parties visées par une mesure législative s'y conformeront si elles sont au courant de la mesure, quelles que soient les pénalités. Il y a toutefois des parties qui l'observeront seulement si elles voient les conséquences négatives qui découlent du non-respect de la mesure. En conséquence, afin de minimiser les cas de non-respect d'une mesure, il est essentiel d'avoir en place un mécanisme d'exécution efficace. Pour qu'un mécanisme d'exécution constitue un moyen de dissuasion efficace, deux composantes sont nécessaires. Premièrement, les pénalités doivent être suffisamment élevées. Deuxièmement, le ministère doit être disposé et apte à exécuter la mesure législative. 3.53 De façon générale, le ministère a déclaré que les pénalités prévues par les différentes mesures législatives seraient des moyens de dissuasion adéquats si elles étaient appliquées. Il a aussi précisé que la plupart des cas de non-respect de mesures législatives sont traités de façon progressive et résolus avant d'en arriver à une poursuite judiciaire comme dernière option. Cependant, dans les deux cas où nous savons qu'une poursuite judiciaire est devenue la dernière option possible pour assurer le respect d'une mesure législative, les résultats n'ont pas été concluants. 3.54 Dans un cas récent, un agriculteur refusait de produire les certificats exigés pour montrer qu'il avait planté des pommes de terre de semence, contrairement aux exigences de la Loi sur l'éradication des maladies des pommes de terre et de son règlement. La situation s'est répétée durant plusieurs années. D'autres recours ont été tentés, mais sans succès. Cependant, le ministère de la Justice estimait qu'il ne pouvait intenter une poursuite à moins d'obtenir de nombreuses preuves, plus qu'il n'était possible d'en produire dans les circonstances. On ne peut dire si le problème découle du libellé de la loi ou d'autre chose. Quoi qu'il en soit, l'incapacité ou le refus d'exécuter la loi laisse entendre aux producteurs qu'il n'est peut-être pas nécessaire de s'y conformer, puisque la menace de pénalité est une menace vide. 3.55 La Loi sur la protection de la couche arable semble susciter encore plus de problèmes sur le plan de son exécution. Tout d'abord, le ministère considère que le montant des amendes est insuffisant. L'amende minimale est de 120 $ seulement, l'équivalent d'un chargement de terre arable environ. Pour ce qui est de l'exécution de la loi, la direction est allée jusqu'à embaucher à grands frais des enquêteurs privés pour recueillir des preuves dans les cas de non- respect. Or, pour diverses raisons, dont il est question à l'annexe du présent chapitre, on n'a pas réussi à monter une cause suffisamment solide pour convaincre le procureur de la Couronne d'intenter une poursuite en vertu de la mesure législative. La direction a noté des cas répétés de non-respect parmi certains producteurs de terre arable, ce qui n'est pas étonnant. Les représentants de la direction ont aussi constaté un certain dérapage dans le nombre de permis délivrés, ce qu'ils attribuent à une exécution de la loi déficiente. Recommandation 3.56 Nous avons recommandé que le ministère, en collaboration avec le ministère de la Justice, apporte tout changement nécessaire visant à faciliter l'exécution future de toutes les mesures législatives dont il a la responsabilité. Il pourrait s'agir de renforcer ou d'augmenter les pénalités administratives telles que les amendes, d'employer différentes techniques de collecte de preuves ou de proposer des modifications législatives. Évaluation des mesures législatives examinées 3.57 Selon le personnel de la Direction de la pomme de terre et de l'horticulture, la Loi sur l'inspection des ruchers vise avant tout à faire en sorte que les apiculteurs du Nouveau-Brunswick soient inscrits et à empêcher que les maladies et les parasites des abeilles n'entrent ou ne se répandent dans la province. Au cours de notre examen, on nous a dit qu'entre 33 % et 60 % des apiculteurs actifs du Nouveau-Brunswick sont inscrits au registre provincial. De plus, nous avons constaté que les abeilles font rarement l'objet d'inspections générales dans la province et que les abeilles importées dans la province ne font pas l'objet d'une vérification du certificat qui doit les accompagner. En conséquence, nous sommes d'avis que les buts de la mesure législative ne sont pas atteints. Le personnel de la direction a expliqué que la mesure n'est pas une priorité comparativement à d'autres mesures mises en application par le ministère. Les ressources affectées à sa mise en application sont donc peu nombreuses. 3.58 Selon le personnel de la Direction des ressources des terres agricoles, le principal objet de la Loi sur la protection de la couche arable est de protéger les terres agricoles contre la dégradation qu'entraîne l'enlèvement de la couche arable. Comme il est discuté dans l'annexe du présent chapitre, pour diverses raisons, l'objet de la mesure n'est pas réalisé. Une raison majeure est que le cadre établi par la mesure législative n'est pas applicable. 3.59 Selon le personnel de la Direction des ressources des terres agricoles, le principal objet de la Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole est de permettre aux agriculteurs de vaquer à leurs activités agricoles sans restrictions injustifiées imposées par des arrêtés locaux et de protéger les terres agricoles contre l'étalement urbain. D'autres dispositions et modifications législatives qui devaient être élaborées en même temps que la mesure n'ont pas encore été promulguées, de sorte qu'il n'y a actuellement aucune protection législative des terres agricoles, et l'objet de la mesure n'est pas réalisé. 3.60 Les trois autres mesures législatives que nous avons examinées, soit le Règlement sur les prêts aux agriculteurs débutants afférent à la Loi sur l'aménagement agricole, la Loi sur l'élevage du bétail et la Loi sur l'éradication des maladies des pommes de terre atteignent leur objectif. 3.61 Par contre, la portée de la Loi sur l'élevage du bétail est très limitée. En mars 2000, cinq nouveaux élevages de bétail ont reçu une licence en vertu de la loi. Au moment de l'entrée en vigueur de la loi, il existait environ 1 500 élevages de bétail, qui sont actuellement exemptés des conditions de la loi et du règlement. Avec le temps, pour que le ministère puisse réellement réaliser l'objet de la mesure législative, il faudrait qu'un pourcentage plus élevé d'élevages de bétail soit visé par les exigences en matière de licence. Nous sommes d'avis que le ministère devrait envisager de recommander au gouvernement d'élargir la portée de la mesure. Recommandations 3.62 Nous avons recommandé que des mesures appropriées soient prises pour améliorer l'efficacité de la Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole afin que la loi atteigne son but de permettre aux agriculteurs de vaquer à leurs activités agricoles sans restrictions indues et de protéger le territoire agricole contre l'étalement urbain. Pour y parvenir, il faudra améliorer la planification de l'utilisation des terres rurales en général, et non se limiter à apporter des modifications à la loi et à ses règlements. 3.63 Nous avons recommandé que le ministère détermine si la mesure législative à l'appui de l'industrie de l'apiculture du Nouveau-Brunswick demeure nécessaire et qu'il présente au gouvernement des recommandations pertinentes concernant la Loi sur l'inspection des ruchers et ses règlements. 3.64 Nous avons recommandé que le ministère élabore une solution de remplacement réaliste à l'actuelle Loi sur la protection de la couche arable et à ses règlements afin de mieux réaliser l'objet de la loi. La solution de remplacement devrait être soumise au gouvernement aux fins d'étude. Si une solution de remplacement réaliste ne peut être élaborée à court terme, le ministère devrait sérieusement envisager de recommander au gouvernement de suspendre la loi et le règlement en attendant l'élaboration d'une telle solution de remplacement. 3.65 Nous avons recommandé que le ministère envisage d'étendre la portée de la Loi sur l'élevage du bétail à un plus grand nombre d'élevages et fournisse au gouvernement les recommandations qu'il juge pertinentes. Conclusion 3.66 Les objectifs de notre examen du ministère de l'Agriculture et de l'Aménagement rural étaient les suivants : Déterminer si des mécanismes et des méthodes appropriés sont instaurés pour : • assurer le respect des mesures législatives; • mesurer l'efficacité des mesures législatives et en faire rapport; • faire en sorte que les ressources affectées à la mise en application des mesures législatives sont gérées en tenant compte des principes d'économie et d'efficience. 3.67 Nous tenons à formuler les conclusions qui suivent en rapport avec les objectifs mentionnés. • À notre avis, le ministère fait des efforts raisonnables pour s'acquitter des fonctions que lui confèrent les mesures législatives. Cependant, le projet de rationalisation en cours au ministère accroît le risque que les ressources soient insuffisantes pour assurer dans l'avenir la réalisation des activités administratives prescrites par les mesures législatives. • Pour les diverses raisons discutées dans le présent chapitre, le respect des mesures législatives que nous avons étudiées varie beaucoup. Ainsi, l'exécution des mesures pose problème, et cela est dû dans certains cas à des mesures mal rédigées qui ne semblent pas applicables sur le plan juridique (par exemple, la Loi sur la protection de la couche arable). • Nous croyons que la mesure des résultats et le rapport du succès à l'Assemblée législative sur l'atteinte des objectifs législatifs visés devraient être améliorés. Pour y parvenir, il faudrait notamment faire en sorte que l'objet de chaque mesure législative soit clairement consigné. Il serait important également de périodiquement réviser et mettre à jour chaque mesure législative dont le ministère a la responsabilité pour s'assurer qu'elle demeure actuelle et pertinente. D'autres mesures à prendre seraient entre autres de fournir un rapport régulier à l'Assemblée législative sur l'efficacité législative et d'améliorer le rapport sur le rendement concernant les activités administratives dans le rapport annuel du ministère. • À notre avis, seulement trois des six mesures législatives que nous avons examinées réussissent actuellement à réaliser leur objet, à savoir le Règlement sur les prêts aux agriculteurs débutants afférent à la Loi sur l'aménagement agricole, la Loi sur l'élevage du bétail et Loi sur l'éradication des maladies des pommes de terre. La Loi sur l'aménagement et la protection du territoire agricole, la Loi sur l'inspection des ruchers et la Loi sur la protection de la couche arable ne semblent pas réussir à réaliser leur objet. • Nous n'avons rien constaté au cours de notre examen qui nous inciterait à croire que les ressources affectées à la mise en application des mesures législatives ne sont pas gérées en tenant compte des principes d'économie et d'efficience. Réponses des ministères 3.68 Après la réalisation de notre travail, le ministère de l'Environnement et des Gouvernements locaux a pris le relais pour la responsabilité de la mise en application de la Loi sur la protection de la couche arable. Le ministère a formulé les commentaires suivants au sujet de nos observations et recommandations : Le ministère est d'accord avec votre affirmation selon laquelle la loi ne réalise pas son objet à l'heure actuelle. Nous sommes également d'accord avec votre recommandation voulant que nous élaborions et présentions au gouvernement une solution de rechange viable à l'actuelle Loi sur la protection de la couche arable et à son règlement. Les recommandations que vous formulez dans votre rapport seront soigneusement prises en considération dans l'élaboration d'une nouvelle approche. [Traduction.] 3.69 Le ministère de l’Agriculture, des Pêches et de l’Aquaculture a répondu positivement à nos recommandations. Annexe - Loi sur la protection de la couche arable La Loi sur la protection de la couche arable a été promulguée en 1995, et le Règlement 95-66 a également été déposé en 1995. Au moment de notre examen, l’application de la mesure législative était la responsabilité de la Direction des ressources des terres agricoles du ministère. D’après ce que nous comprenons, la mise en application de la Loi sur la protection de la couche arable et du Règlement 95-66 a été transférée au nouveau ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux le 1er avril 2000. Les conséquences sur le statut juridique des permis d’enlèvement de la couche arable délivrés par le ministère après cette date ne sont pas claires, puisque ces permis portent la signature d’un représentant du ministre de l’Agriculture et de l’Aménagement rural. Des représentants de la Direction des ressources des terres agricoles ont indiqué que l’objet de la mesure législative est de protéger les terres agricoles contre la dégradation entraînée par l’enlèvement de la couche arable. Ils ont aussi précisé que le ministère de l’Environnement voit la mesure comme un moyen de protéger les cours d’eau. La Direction des ressources des terres agricoles a déclaré que l’objet de la mesure législative ne peut être réalisé selon le libellé actuel de la loi et du règlement. Dans les faits, l’approche prescrite par la mesure législative ne fonctionne pas. La mesure s’est avérée difficile à appliquer et à exécuter de façon équitable. Il s’ensuit que l’efficacité globale de la mesure est très limitée. De plus, la mesure crée dans le public des attentes qui ne peuvent être satisfaites, ce qui porte atteinte à la capacité du gouvernement de réglementer l’enlèvement de la couche arable. La mesure législative et sa mise en application soulèvent plusieurs préoccupations. • La mesure législative permet d’enlever la couche arable sur un maximum de 5 % de la superficie totale d’une parcelle qui a été utilisée pour la production agricole au cours des vingt dernières années. Sur le plan de la surveillance et de l’exécution, il est difficile de recueillir des preuves sur l’utilisation agricole de la terre au cours des vingt dernières années. Il est également difficile d’établir la superficie qui a été cultivée. • La « règle du 5 % » soulève également une question d’équité. Un nombre important de producteurs de terre arable ont acheté et utilisé des parcelles de terrain dans le seul but d’en enlever la couche arable. À l’entrée en vigueur de la loi, ces producteurs se sont retrouvés dans une situation où ils ne pouvaient plus utiliser le terrain dans le but pour lequel ils l’avaient acheté. Dans deux ou trois cas, cela a mené à l’abandon d’exploitations viables. • Permettre l’enlèvement de la couche arable sur aussi peu que 5 % de la superficie d’une parcelle de terre agricole résulte dans la dégradation d’une partie du terrain, ce qui ne semble pas compatible avec l’objet de la mesure législative. • Le ministère a eu beaucoup de difficulté à établir légalement qu’il y a eu enlèvement de la couche arable en vertu de la définition de « couche arable » consignée dans la loi. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles aucune poursuite n’a été intentée pour non-respect de cette loi. Les autres raisons ont trait à l’établissement juridique des limites des biens-fonds. • Dans certains cas, le ministère a eu de la difficulté à déterminer si les propositions visant certains projets étaient légitimes (p. ex. aménagement de chemins privés, chantiers de construction, culture de la canneberge, etc.). Dans ces cas, l’enlèvement de la couche arable n’est pas visé par la mesure législative, une échappatoire importante dont il a été abusé, de l’avis de la direction. • Le personnel d’inspection désigné par la loi fait partie du personnel régional du ministère. Pour la plupart, il s’agit de spécialistes agricoles qui n’ont aucune expérience à titre d’inspecteur. De plus, comme ils sont en faveur de l’industrie agricole, il leur est difficile, selon eux, d’exécuter la loi de façon impartiale. L’emploi d’inspecteurs expérimentés et indépendants pourrait être bénéfique à l’avenir. • La mesure législative actuelle exige un engagement de ressources beaucoup plus important qu’il n’est possible de le faire pour l’instant. De façon générale, la direction estime ne pas avoir suffisamment de personnel pour bien mettre en application, surveiller et exécuter les dispositions de la loi. En revanche, elle ne recommande pas l’ajout de ressources tant que l’efficacité de la loi n’est pas améliorée. • Étant donné les ressources humaines limitées qui peuvent consacrer du temps à l’application de la loi, la direction concentre la majorité de ses efforts sur le traitement en temps opportun des demandes de permis qui sont reçues. Elle ne pense toutefois pas avoir particulièrement bien réussi à inciter les producteurs de terre arable à obtenir des permis. Le nombre de titulaires de permis diminue graduellement. De l’avis de la direction, la situation découle de l’incapacité du ministère de gagner des poursuites en vertu de la loi. • La direction fait peu en matière de surveillance proactive pour repérer les cas de non-respect. Elle dépend des plaintes du public, des organisations agricoles et d’autres producteurs de terre arable. Cela a contribué à l’inefficacité de la loi et à son application inéquitable. • La direction considère que les amendes imposées pour le non-respect de la mesure législative sont insuffisantes. L’amende minimale est de 120 $, soit la valeur d’un chargement de terre arable environ. • En ce qui concerne l’exécution, la direction est allée jusqu’à embaucher des enquêteurs privés pour recueillir des preuves de non-respect de la loi. Ceux-ci n’ont toutefois pas réussi à monter une cause suffisamment solide pour convaincre le procureur de la Couronne d’intenter une poursuite en vertu de la loi. La direction a noté des cas répétés de non-respect parmi certains producteurs de terre arable, ce qui n’est pas surprenant. • Recueillir des preuves coûte cher. Le personnel de la direction a signalé que les coûts peuvent atteindre les 5 000 $ s’il faut qu’un enquêteur témoigne en cour. Les rétroactions des intervenants en rapport avec la mesure législative sont systématiquement négatives. • Le grand public pense que la mesure législative permet au ministère d’arrêter l’enlèvement de la couche arable en toutes circonstances. Or, l’incapacité du ministère de satisfaire à de telles attentes a engendré des conflits, et il arrive que le personnel passe des heures à expliquer pourquoi ils ne peuvent prendre de mesures contre un entrepreneur en particulier. Bon nombre des plaintes et des appels n’ont rien à voir avec les terres agricoles. Des considérations esthétiques, des chicanes de voisins, le bruit et la poussière sont des motifs de plainte courants, et aucun de ces aspects n’est visé par la mesure législative. • Les producteurs de terre arable estiment que le gouvernement s’ingère dans leurs affaires, qu’ils sont propriétaires de leurs terres et qu’ils peuvent en faire ce qu’ils veulent. Certains producteurs sont mécontents du fait qu’ils observent les règles alors que d’autres ne les observent pas. Les membres de la New Brunswick Horticultural Trades Association, dont certains sont des producteurs de terre arable, sont très proactifs. Sinon, l’industrie fait preuve de peu d’intérêt à l’égard de la question. • Les agriculteurs et les organisations agricoles estiment que le ministère ne protège pas efficacement les terres agricoles contre l’enlèvement de la couche arable. La direction tente activement d’améliorer la réalisation de l’objet de la mesure législative. Elle a élaboré deux propositions de remplacement visant à améliorer l’efficacité de la loi. La première proposition prévoit une réorientation majeure de l’approche prise pour tenter de limiter l’enlèvement de la couche arable des terres agricoles. Il serait interdit d’enlever la couche arable partout dans la province. Des exemptions seraient ensuite accordées pour toutes les parcelles, à l’exception des terres inscrites en vertu de la Loi sur l’aménagement et la protection du territoire agricole. Comme deuxième solution, la direction recommande de suspendre la loi actuelle et d’entreprendre de vastes consultations auprès des intervenants afin de déterminer la nécessité de contrôler l’enlèvement de la couche arable et de voir si une mesure législative est l’instrument qui convient le mieux pour atteindre le but visé. Nos croyons comprendre que ces propositions n’ont pas encore dépassé l’étape du ministère en raison des préoccupations du ministère de la Justice relatives à l’approche proposée.